JOUR 20

J’ouvre la tente, Lucas est déjà parti en ville chercher un carton pour prendre son vol dans l’après midi. Je dois pour ma part amener le vélo dans un bikeshop pour essayer de voir d’où vient ce bruit. 

Après explication du problème, Odín décide de se concentrer sur l’axe du pédalier. On va le changer, regraisser le tout. 10 minutes plus tard j’essaye le vélo, le problème est toujours là dans les montées, un bruit de craquement. Rien d’anormal sur les manivelles, on change les pedales. Toujours pas ça. On remonte les anciennes pédales. On démonte la cassette de la roue arrière pour la resserrer correctement : même problème.

13:00, Lucas est à la gare, je fais l’Aller/Retour en express pour le saluer. 
20 minutes plus tard retour au problème. On lave la roue en entier, recolle un nouveau fond de jante : rien. On decide d’enlever la roue, le bruit semble s’atténuer voir disparaître. Odin et Gerhard font un maximum pour réparer le vélo dans les temps. On décide alors de vérifier la tension des rayons. Rien d’anormal, on arrive à bout des solutions, on desserre et resserre tout à la clé dynamométrique. Je réessaye, le bruit semble être parti, sans trop savoir comment ni pourquoi ! 

Il est 15:00, je dois prendre un ferry et pédaler 160 kilomètres. La météo est bonne, je pédalerai probablement jusque tard. Vanvikan, 16:00 :début de journée. 
Côte de 4 kilomètres à 8% : bienvenu.


Je m’attacherai à faire le moins de pauses possible. Les paysages le long des bras de mer sont splendides, les routes également, je suis presque seul. 

22:55, j’arrive enfin à Namsos après 161 kilomètres. On n’a pas encore de lieu pour dormir mais on ira boire un verre avant ça. 

 L’histoire se répète : des gens intrigués de voir un mec débarqués dans leur petit village de pêcheurs avec un moule bite, je tente ma chance.

“Would it be possible to take a shower at your place ?

— A shower and a bed if you want”

Et c'est comme cela que nous avons pu rencontrer KAIA, notre sauveur d'une nuit. 

JOUR 21

Kaia a vraiment été l’hôte parfait. On serait bien restés plus longtemps mais il est déjà 13h00 et une longue journée nous attend. Le retour de la pluie est attendu en fin de journée, j’espère passer entre les gouttes. 

La météo et les paysages changent au fur et à mesure que la journée avance. 
Un temps couvert, bientôt pluvieux.

Je rencontre aussi ce couple autrichien en route pour le Cap Nord. On roule 15 kilomètres ensemble, je leur demande s’ils ont regardé l’horaire du ferry. 15h50, c’est dans 30 minutes, 15 kilomètres à faire. Je leur dis que je vais devoir les laisser, que je vais essayer de l’avoir. Ils me regardent un peu interloqués et me lancent un “see you on the next ferry”.

C’était mal connaître le garçon, il en fallait peu pour me motiver. 5 derniers kilomètres, ça va être juste, j’envoie tout ce que j’ai. Dernier km, le ferry est déjà là, je débarque à toute allure sur le quai. Je suis dedans, pas sû que je recroise Philip de si tôt. Have a safe trip guys it was fun sharing the road with you. 

La suite devient un peu moins passionnante, la pluie fait son apparition.

Le dernier ferry arrivera tard, tout comme nous à Berg, sous un crachin que l’on pourrait qualifier de breton. 22:20, aucun endroit pour dormir, une pluie torrentielle est attendue dans les heures qui viennent. Il fait encore jour je ne perds pas espoir.

C’est finalement en me baladant dans un quartier résidentiel que je vois un couple rentrant à leur domicile avec un énorme garage. 

 

“Excuse me, I am biking from France to Nordkap, do you mind if I stay in your garage for the night ?” 

Emballé, c’est pesé : mieux que le garage, on nous ouvre une sorte de bâtiment communautaire avec lits, douches et cuisine. Une secte peut être. On est au chaud c’est l’essentiel.

On planche sur l’itinéraire de demain : 3, 4 voir peut être 5 ferrys, faire correspondre tous les horaires n’est pas évident, pas sûr que ça passe. 

JOUR 22

Les hôtes d’hier resteront des inconnus sur lesquels nous ne pourrons mettre de prénoms. Il est 9h30, je regarde par la fenêtre. Le vent vient coucher toutes les branches visibles. La pluie fouette les voitures. Je regarde les prévisions météo de la journée : je ne me suis pas trompé, 30 km/h vent de face et pluie intense jusqu’à 17h au moins. 

On souhaite arriver aux Îles Lofoten demain soir, on n’est pas en retard. Je me pose la question de savoir s’il est bien judicieux de pousser. La réponse viendra à moi dans la journée. 


Le 1er ferry est à 38 kilomètres à 12:30. Il est 11:07. Si je rate un des 3 premiers ferrys on oublie l’idée d’être aux Lofoten demain soir. Je pars pour un premier contre la montre d’1h20. Mes yeux reçoivent tellement d’eau que je peine à les garder ouvert. Je passe 1h20 à faire des calculs savants sur mon horaire d’arrivée en prenant compte du dénivelé. 12:28 j’y arrive, Ludo m’annonce que le ferry n’était pas à 12:30 mais à 13:10.

On recommence les calculs, 2eme contre la montre à venir : arrivée du 1er ferry à 13:30, prochain ferry à 14:10 à 17 kilomètres : 5 minutes d’avance cette fois-ci. Arrivée théorique du 2eme ferry à 14:50, prochain ferry à 16:30 à 38 kilomètres (seul et unique ferry de la journée). J’étais un peu trop large, le ferry arrivera avec 10 minutes de retard ne me laissant plus qu’une heure et demie. La pluie redouble d’intensité et fouette ma peau à travers mes vêtements. Je ferme les yeux par instants pour tenter d’évacuer l’eau qui y rentre. 

J’ouvre la bouche pour faire rentrer un maximum d’air, l’acide monte dans les jambes, je dois avoir ce putain de ferry. Au bout d’une heure je suis presque convaincu que je l’aurai, j’ai 10 min d’avance. Arrivés à Sandnessjoen, je ne trouve pas le quai. 10 min c’est pas si large quand il s’agit de trouver un ferry que l’on connaît pas. Ludo essaye de le trouver, 4 min avant le départ on le trouve, il vient me chercher, me guide avec la voiture. 16:27 je suis dans le ferry, fin de la pression. Ludo devra faire 2h30 de route, voitures non acceptées. 

Le ferry est salvateur, j’essore mes vêtements totalement trempés, manche 2 hot dogs, 3 snickers et je repars. Ludo me rejoindra pour le ferry suivant à Kilboghamn. Je rencontre Julus un allemand à vélo qui va aussi jusqu’au Cap Nord. 2 ans en Australie, première expérience jusqu’au Cap Nord et la volonté de faire un film. On partage les 27 kilomètres jusqu’au prochain ferry. Il demande à m’interviewer, avec plaisir. 


Nos chemins se sépareront ensuite. 

Encore 2 ferrys pour rejoindre Ørnes. L’unique ferry est à 8:00 demain matin. J’ai déjà fait 120 kilomètres, Il m’en reste 55. Le prochain ferry est à 22:05, on embarquera totalement seuls. 



2 choix s’offrent à moi maintenant. Pousser dans la nuit sous la pluie constante ou faire 30 kilomètres avant 8h du matin demain. Je suis trempé, mes vêtements ne seront pas secs demain. Je décide de pousser. Au bout de 174 kilomètres et plus de 13h00 après être parti, j’arrive au quai du ferry. On dormira devant pour être sûr de ne pas le rater demain.

JOUR 23 

Journée de transit vers les Lofotens

Après une grosse journée la veille, on se dirige vers les Lofoten. On a dormi sur le quai du ferry, aucun risque de le rater..

6h45 du matin on est dans le 1er ferry. Il en faudra 2 de plus pour arriver a Moskenes porte d’entrée des Lofoten.


15h00 on embarque. Plus les minutes passent sur le ferry plus le relief prend de la hauteur sur l’horizon.

 La lumière est exceptionnelle, les paysages également. Je vais bientôt poser mes roues dans un des plus beaux archipels du monde à plus de 3000 kilomètres de la maison. 


Session photos obligatoire !

(du soleil en Norvège en ce moment il faut en profiter) et bivouac de rêve avant de repartir pour les 1000 derniers kilomètres demain !